Ce texte a été publié en août 2016 sur le site Internet de l'Association Belge des Athées (ABA)
« Rituel encore, et du moins bon, lorsque, en fin de
congrès, l’assistance ayant entonné « L’Internationale » avec le peu
de paroles qu’elle en savait, il se trouvait toujours au fond de la salle un
groupe de loustics pour ajouter, en guise d’exorde : « à bas les
calotins ! » »[1].
C’est ainsi que Robert Falony, dans son ouvrage sur l’histoire récente du parti
socialiste, mentionne une tradition qui existe également à la FGTB mais dont
nous n’avons retrouvé aucune autre mention.
1° Une pratique
finalement limitée
Faisant partie de l’indécrottable « groupe de loustics »
qui tient à ponctuer le refrain de l’Internationale par un vibrant « à bas
les calotins », je me suis interrogé sur l’origine de cette pratique mais
aussi sur sa diffusion. Car si, par expérience, nous pouvons l’attester à la
FGTB et que l’extrait cité ci-dessus en confirme la pratique au PS, nous avons
voulu savoir si cette pratique était plus large tout en ayant de sérieux doutes
dès le départ. Après avoir fait le tour de cette question, nous tenterons de
déterminer pourquoi cette pratique, née comme nous le verrons à la période
charnière de la toute fin du 19e – début du 20e siècle,
semble être une spécificité de la social-démocratie belge francophone et
terminerons par une explication de ce qu’elle peut encore représenter
aujourd’hui et de pourquoi nous considérons qu’elle reste pertinente.
Des sources consultées et des témoignages recueillis, et
dans l’espoir que cet article suscitera des compléments d’informations[2],
nous sommes certains que la pratique existe au sein du PS belge[3],
au grand dam régulier des présidents et responsables de ce parti pour des
raisons sur lesquelles nous reviendrons ci-dessous. Par capillarité, elle est
également présente au sein de la FGTB avec plus ou moins d’intensité. Par
contre elle est absente des formations à la gauche du parti socialiste. Que ce
soit au Parti Communiste, chez les différentes formations Trotskystes (LCR,
PSL…) ou au sein du PTB maoïste, le cri ne retentit pas. On peut supposer que
la prédominance du facteur de classe sur tous les autres facteurs dans
l’idéologie de ces formations les rendent assez imperméables, voire hostiles, à
une forme trop radicale de laïcité qui pourrait diviser les travailleurs sur
une contradiction secondaire. La citation suivante de Lénine résume ce
positionnement, dans un texte où il affirme par ailleurs clairement la
nécessité du combat contre les croyances et de faire de la religion une affaire
purement privée : « Il serait absurde de croire que, dans une société
fondée sur l’oppression sans bornes et l’abrutissement des masses ouvrières,
les préjugés religieux puissent être dissipés par la seule propagande. Oublier
que l’oppression religieuse de l’humanité n’est que le produit et le reflet de l’oppression
économique au sein de la société serait faire preuve de médiocrité bourgeoise.
Ni les livres ni la propagande n’éclaireront le prolétariat s’il n’est pas
éclairé par la lutte qu’il soutient lui-même contre les forces ténébreuses du
capitalisme. L’unité de cette lutte réellement révolutionnaire de la classe
opprimée combattant pour se créer un paradis sur la terre nous importe plus que
l’unité d’opinion des prolétaires sur le paradis du ciel »[4].
Ajoutons que ces formations viennent après la première guerre mondiale. Une
apparition plus tardive (renforcée par une sociologie différente) qui a certainement
joué dans la pertinence qu’il y avait à utiliser la formule. Reste le cas des
mouvements anarchistes, souvent très anticléricaux, mais où là c’est le fait
même de prendre l’Internationale
comme chant de référence qui est en question.
Notons par ailleurs qu’en Flandre la formule est différente
puisqu’elle devient « en rood is troef », qui renvoie soit au jeu de cartes (le rouge est l’atout),
soit par analogie avec l’expression « armoe troef » (la misère est
partout) à une vision prophétique
performative où le rouge l’aurait emporté. Quoi qu’il en soit, nous sommes dans
tous les cas loin d’une référence au monde catholique ! Ce qui pourrait
s’expliquer par le fait que la formule apparait dans une temporalité où l’on
parle en français. Quand il s’agira de passer au néerlandais, le contexte aura
évolué, surtout dans un paysage flamand où c’est la démocratie chrétienne qui prédomine
au sein du mouvement ouvrier.
2° Les rapports
tendus entre le socialisme et la laïcité en Belgique
Il s’agit maintenant d’expliquer pourquoi cette pratique
s’est développée à la toute fin du 19e siècle et au sein du POB et de
ses diverses organisations où elle s’est maintenue jusqu’à nos jours. La
réponse à cette question se trouve dans l’histoire, au début commune, du
mouvement ouvrier structuré et de la laïcité en Belgique[5].
Une histoire commune qui n’est compréhensible que si l’on prend en compte la
spécificité belge où le poids de l’église catholique restera important et où le
mouvement ouvrier ne pourra pas, comme en France après 1905, « apaiser la
question religieuse pour poser la question sociale » pour reprendre la
formule d’Alain Gresh[6].
Jean Puissant, dans un article publié récemment, résume
parfaitement ce contexte : « Il se fait qu’en Belgique l’église
catholique est au pouvoir directement dans un premier temps, par
l’intermédiaire du « monde catholique » ensuite, du parti au plan
politique enfin, certainement de 1870 à 1914. Ce n’est le cas ni en France ni
en Allemagne ni en Grande-Bretagne, ni aux Pays-Bas. La classe ouvrière
nouvelle (le prolétariat), pour des raisons sociologiques (l’église n’est plus
au milieu du village, le village n’est plus l’unité spatiale dominante, la
paroisse l’unité sociale de base) puis politique (le catholicisme au pouvoir)
prend massivement ses distances avec ses traditions religieuses. Beaucoup
militent dans des associations rationalistes » [7]
Nous reviendrons plus loin sur la fin de cette citation.
Mais donc, dès sa fondation, l’état belge subit une mainmise de l’église
catholique très forte (rappelons que la « révolution » belge a aussi
un aspect de guerre de religion puisque le sud catholique se détache du nord
protestant). Devant cette réalité, le mouvement ouvrier va donc se développer,
peut-être plus que dans d’autres pays en opposition avec la bourgeoisie mais
aussi avec le clergé catholique, dans une Belgique considérée comme le paradis
du capitalisme à la législation sociale en retard sur les pays voisins. Cette alliance entre la bourgeoisie, le sabre
et le goupillon est bien décrite par Marx et Engels : « Il n’existe qu’un
seul petit pays du monde civilisé où les forces armées sont là pour massacrer
des ouvriers en grève, où toute grève est saisie avec avidité et malignité
comme prétexte pour massacrer officiellement les ouvriers. Ce petit pays unique
et béni, c’est la Belgique, l’état modèle du constitutionnalisme continental,
le confortable paradis et la chasse-gardée des propriétaires fonciers, des
capitalistes et des curés.»[8]
C’est un ouvrier bruxellois, qui eut également un rôle
important dans le développement du mouvement ouvrier naissant, Nicolas Coulon,
qui fonde en 1854 la première société de Libre Pensée L’Affranchissement. « En fait, L’Affranchissement
se fixa comme objectif l’émancipation morale et matérielle de l’homme. Non
seulement il s’agissait de se libérer de tout dogmatisme et de tout
obscurantisme, mais encore de rompre l’assujettissement des classes laborieuses
par le système économique libéral. Pour combattre le cléricalisme et le
capitalisme, considérés comme oppresseurs alliés, le rationalisme et le
socialisme ne pouvaient qu’être intimement unis. Au sein de L’Affranchissement se réalisa donc une
symbiose véritable entre mouvements ouvriers et libres penseurs»[9].
Parallèlement les idées fouriéristes se diffusent en Belgique et marquent la
frange la plus aisée des travailleurs qui formera un noyau organisationnel, un
réseau qui jouera un rôle très important dans la naissance du POB. Dès cet
instant, les développements seront liés entre la structuration du mouvement
ouvrier et celle de la libre pensée. La carte de l’implantation des sociétés de
libre pensée recoupe significativement celle des concentrations ouvrières[10].
Dans le Hainaut principalement il est clair que la Libre Pensée sert alors de
paravent à la structuration d’un mouvement ouvrier à une époque où le droit de
coalition n’est pas encore conquis. Une situation résumée ainsi par Marcel Liebman
dans son ouvrage majeur sur le socialisme belge : « Pendant longtemps, (…)
“un anticléricalisme militant permet de confondre la lutte contre l’Eglise et
la lutte contre le régime capitaliste”. C’est vers 1850 que le socialisme
devient, en Belgique, anti-religieux et plus particulièrement anticlérical (…)
tandis que les organisations ouvrières naissent et disparaissent s’avérant
incapables d’une existence stable, ce sont des sociétés de libre-pensée qui,
bien souvent, assurent la continuité entre les différents et successifs
rassemblements de travailleurs. Leurs promoteurs et leurs artisans se trouvent
ainsi, et presque en permanence, en contact avec les libéraux »[11].
Lorsqu’il se crée en 1885, le POB est le fruit d’un
regroupement de groupes d’origines diverses dont une forte composante issue
d’une bourgeoisie progressiste qui s’est détachée du parti libéral mais qui
garde des attaches avec son milieu d’origine. Sur cet aspect comme sur bien
d’autres, le POB est à la fois produit et initiateur de structuration. Le lien
ne se distendra pas pour deux raisons : d’une part l’alliance stratégique entre libéraux et
socialistes pour faire face à l’hégémonie du parti catholique qui est seul au
pouvoir de 1884 à 1914, et d’autre part une sociabilité commune notamment à
travers la fréquentation des loges maçonniques à un moment où le Grand Orient
de Belgique s’investit dans la question sociale, principalement en faveur du
Suffrage Universel, mais aussi en envisageant alors la réglementation du
travail des femmes et des enfants, l’instauration d’un système d’assurances
sociales, la réduction du temps de travail, la lutte contre l’alcoolisme et
même une représentation ouvrière aux conseils communaux et provinciaux. Dans ce
contexte, le GOB n’hésite pas à venir en aide financièrement au POB. Il n’est
d’ailleurs pas ici anodin de signaler que c’est à l’Affranchissement que Théodore Verhaegen (fondateur de
l’Université Libre de Bruxelles et sérénissime grand maître du Grand Orient de
Belgique) confie l’organisation de ses funérailles en 1862.
La Libre Pensée est aussi, à cette époque, fortement
imprégnée de la volonté de changement social. Le congrès national de la Libre
Pensée, réuni à Herstal les 21 et 22 mai 1893, dénonce le vote plural et
confirme la revendication en faveur du Suffrage Universel. Celui de 1895 ajoute
à cette revendication la limitation légale des heures de travail, la fixation
d’un salaire minimum et la réglementation du travail (surtout pour les femmes
et les enfants). Si, à Bruxelles, les choses sont complexes, les luttes autour
des cimetières et de l’instruction prenant plus de place, dans le bassin industriel
wallon, les membres des sociétés de libres penseurs sont clairement en faveur
de mesures concrètes pour améliorer le sort de la classe ouvrière. Ils
considèrent d’ailleurs que l’on ne peut dissocier la Libre Pensée de la
question sociale. Dans le Borinage, on ira même jusqu’à stipuler en 1902 qu’il
faut être socialiste pour adhérer à l’un des groupes libres penseurs de la
région.
La situation commencera à changer au tournant du siècle. Les
résultats électoraux de la fin du 19e siècle vont progressivement modifier
la donne, avec la menace de la disparition du parti libéral, qui déboucherait
sur une bipolarisation de la vie politique, sociale et économique entre les
Socialistes et les Catholiques en Belgique. Cette bipolarisation se marquerait
sur trois axes qui se superposent : ouvriers contre bourgeois, athées contre
croyants, Wallons contre Flamands. Du côté libéral, les échecs répétés sont
attribués au rapprochement avec les socialistes. Du côté socialiste, les
tensions sont vives avec un nombre de voix de plus en plus élevées qui
dénoncent le positionnement anticlérical. Celui-ci est critiqué tant par l’aile
gauche, qui plaide pour un recentrage sur l’unique question socio-économique,
que par l’aile droite, qui désire cesser d’effrayer les travailleurs chrétiens
et ainsi les détacher électoralement du Parti Catholique à un moment où la
Démocratie Chrétienne se développe principalement en Flandre. Ce sont surtout
les arguments et les manœuvres de l’aile droite qui font que finalement, en
1912, la Fédération nationale des sociétés de Libre Pensée invite ses sociétés
à dénoncer leur affiliation au POB afin d’éviter que des ligues et corporations
ouvrières confessionnelles intègrent le POB, ce que certains dirigeants du
parti prônaient en s’appuyant sur la présence des sociétés de Libres Penseurs.
La conséquence est immédiate et entre 1911 et 1937, la Libre Pensée perd plus
de 65% de ses membres, chiffre on ne peut plus illustratif. À noter que ce sera
toujours cet argument électoral de ne pas effrayer l’électorat croyant qui de Léo
Collard à Élio Di Rupo, en passant par Philippe Busquin, fait que nombre de
présidents du PS n’apprécient guère le « à bas les calotins » sujet
de cet étude.
L’historienne Gita Deneckere résume bien cette période et
cette histoire : « Les organisations de libres penseurs tracèrent la voie de
l’engagement social et stimulèrent la conquête du pouvoir par les libéraux
radicaux et les sociaux-démocrates. La Belgique posséda l’un des mouvements
rationalistes radicaux les plus amples, les plus actifs et les plus
différenciés»[12].
Après la première guerre mondiale, le tripartisme s’instaure en Belgique. Cela
ne met cependant pas fin à des oppositions fortes sur lesquelles les liens
entre la lutte sociale et la lutte contre l’Eglise se recouperont. Citons la
question royale et la grève de l’hiver 60-61 où la hiérarchie catholique
bridera clairement l’action sociale, la mobilisation autour de Willy Peers… Autant
d’occasions, auxquelles on doit ajouter la guerre scolaire, qui maintiendront
actuelles et vivantes une lutte commune entre mouvement ouvrier et mouvement
laïque.
3° Une pratique
similaire, le chant « à bas la calotte »
Nous avons posé le contexte historique d’origine d’une
scansion dont nous n’avons pu à ce stade de nos recherches retrouver à quelle
date précise elle est apparue. Nous pouvons cependant ajouter que cela ne peut
être avant la toute fin du 19e siècle car ce n’est qu’à cette époque
que l’Internationale, écrite au
lendemain de la Commune de Paris en 1871 par Eugène Pottier, va remplacer la Marseillaise comme principal chant
révolutionnaire au sein du mouvement ouvrier, et ce après sa première
publication dans un recueil en 1887 et sa mise en musique par Degeyter l’année
suivante (elle était jusqu’à cette date chantée sur l’air de… La Marseillaise). Une datation qui
correspond d’ailleurs à la période où mouvement ouvrier, Franc Maçonnerie et
Libre Pensée sont le plus en phase. Enfin, pour celles et ceux qui ne
connaissent pas l’ensemble des couplets de l’Internationale, il semble utile d’ajouter un élément de
compréhension à l’ajoute anti cléricale qui se met ainsi en place dans la
dernière décennie du 19e siècle : si le texte comprend un
passage antimilitariste il ne comprend pas de passage anticlérical. « À
bas les calotins » comble ainsi ce que d’aucun en Belgique ont sans doute
considéré comme une lacune qu’il fallait corriger dans le contexte belge.
Il nous semble intéressant de faire une petite digression
élargissant quelque peu le propos hors du champ stricte de la gauche, sur un
domaine où il y aurait certes encore pas mal de choses à dire mais qui nous
éloignerait trop de notre propos. Le « à bas les calotins » est
souvent lié à un autre chant intitulé « à bas la calotte ». Un chant
assez court d’ailleurs qui dit ceci :
« À bas la calotte (bis)
À bas les calotins
Ils en auront, des coups d’poings sur la gueule
Ils en auront, autant qu’ils en voudront
Avec, avec plaisir et dans les roses,
Ou dans les bégonias, c’est la même chose
Oui nous irons chasser ohé (bis)
Oui nous irons chasser la calotte
La calotte, au poteau! (bis)
La calotte, au zoo,
Libérez les animaux! »
Ce qui est intéressant pour notre propos c’est que ce chant
que l’on retrouvera dans la laïcité et dans le monde socialiste, provient de la
même sociabilité et de la même convergence que celle décrite plus haut puisqu’il
s’agit d’un chant des étudiants de l’ULB s’adressant plus d’ailleurs aux
étudiants de Louvain qu’au clergé, mais repris avec une signification plus
large en dehors du milieu estudiantin. Mais nos recherches nous ont fait
découvrir un autre chant, plus ancien, ayant le même titre et dont le texte
dénonce avec plus de force la religion tout en parlant d’une autre société. La
chanson de Georges Bargas, datée de 1902 et mentionnée comme « chant
révolutionnaire », a pour refrain
« À bas la calotte
La calotte il n’en faut pas
À bas la calotte
La calotte à bas »
Entre le premier couplet disant
« Il est donc venu le moment,
De cesser votre boniment,
Va falloir rat de sacristie
Et vous tous avaleurs d’hosties,
Brûler, sinon gare à votre peau
Vos saints et tous vos
oripeaux »
Et le dernier qui évoque
« martyrs des justes vérités
Que le froc a persécuté
Vos noms sont gravés dans
l’Histoire
Au marbre rouge de la gloire
Et la neuve société
Applaudit votre impiété »
Trois autres couplets évoquent de manière crue et irrévérencieuse
la question des couvents, la pédophilie des prêtres et l’éducation.
4° Calotins n’est pas
synonyme de croyants
Mais que ce soit dans les deux chansons évoquées où dans le
cri « à bas les calotins », et contrairement à ce que pensent beaucoup
de personnes, voire de militants, qui s’offusquent de ce complément, ce n’est
pas le croyant qui est visé mais le clérical.
Tant l’origine que la définition du mot calotin[13]
enlèvent toute ambiguïté sur le sujet. Le mot apparait en 1717 pour désigner un
membre d’un ordre imaginaire et burlesque qui distribuait des calottes, soit
des petites gifles, à tous les personnages qui prêtaient le flanc à la
critique. La calotte, terme datant de la fin du 14e siècle où il
désigne une sorte de bonnet avant de désigner spécialement la coiffe
ecclésiastique ayant la forme d’un petit bonnet rond couvrant le haut du crâne,
prend ainsi au début du 18e siècle une seconde signification. En
1780, le terme calotin prend une connotation péjorative envers le prêtre avant de
désigner par extension, à partir de 1851, un partisan du pouvoir temporel des
prêtres.
C’est donc bien un partisan du pouvoir temporel des prêtres
qui est dénoncé par le cri « à bas les calotins ». Et si la confusion
est compréhensible, au point d’être entretenue y compris par certains laïques
et/ou socialistes opposés à son utilisation, il nous semblait important de la
démonter en reprécisant bien les choses. Une dénonciation des partisans d’un
pouvoir temporel du clergé par un tel cri est parfaitement compréhensible à
l’époque où cette tradition s’est mise en place au vu du contexte que nous
avons décrit. La question est évidemment, au-delà des questions électoralistes
déjà évoquées, de savoir s’il est toujours pertinent aujourd’hui.
Si c’est évidemment à chacun d’en juger, nous pensons très
clairement que, l’ambiguïté sur la critique du croyant levée, la réponse est
positive. Que ce soit sur les questions éthiques comme l’avortement ou
l’homosexualité, de la scolarité avec les réseaux confessionnels, de la
neutralité des fonctionnaires publics, de la question des préséances lors des
cérémonies… on constate que la volonté du clergé des églises, pas uniquement
l’église catholique mais de toutes les religions, de se mêler de la vie
publique, d’interférer dans le pouvoir temporel n’a pas disparu.
Et donc, aujourd’hui comme hier :
L’Internationale sera le genre humain…
À BAS LES CALOTINS !
[1]
Falony, Robert, Le Parti
socialiste : un demi siècle de bouleversement, Bruxelles, PAC-Luc
Pire, 2006, p.32
[2] Le
lecteur ou la lectrice qui en a peut me contacter via FaceBook, Tweeter ou
julien.dohet@skynet.be
[3]
Pour la France on lira Philippe Boutry, La
gauche et la religion in Histoire des
gauches en France. Vol.1 L’héritage du XIXe siècle, Paris, La Découverte,
2004, pp.317-341 . Une contribution
qui décrit combien pendant la période étudiée dans notre article la France
connait une liaison similaire entre mouvement ouvrier et libre pensée qui débouche
également sur un anticléricalisme fort mais aucune mention n’est faite d’un
« à bas les calotins » après L’Internationale.
[4] Socialisme et religion. Article publié le 3 décembre 1905 dans « Novaïa
Jizn » repris ici de V. Lénine, Œuvres.
Tome 10. Novembre 1905 - juin 1906, Paris-Moscou, éditions
sociales-éditions du progrès, 1967, p.84
[5]
Voir pour un développement plus approfondi notre ouvrage Vive la sociale. Mouvement
ouvrier, capitalisme et laïcité, Bruxelles, Espace de liberté, 2011
[6] Gresh,
Alain, Aux origines des controverses sur la laïcité in Le Monde diplomatique, août 2003,
pp.18-19
[7] Puissant,
Jean, Les grèves générales en Belgique
avant 1914 : Paradigmes, paradoxes et réalités. In Grève générale, rêve général. Espoir de
transformation sociale, Paris, L’Harmattan, 2016, p.203
[8] Marx,
Karl et Engels, Friedrich, La Belgique.
État constitutionnel modèle, Paris, édition fil du temps, s.d, pp.285-286.
[9] Tyssens,
Jeffrey Origines et développement de la
Libre Pensée à Bruxelles in 1789-1989. 200 ans de libre pensée en Belgique,
Charleroi, CAL-Charleroi, 1989, p.16
[10] Voir
la carte publiée in Hasquin, Hervé, La
Wallonie. Son histoire, Bruxelles, Luc Pire, 1999, p.158
[11] Liebman,
Marcel, Les socialistes belges 1885-1914.
La révolte et l’organisation, coll. Histoire du mouvement ouvrier en
Belgique, n°3, Bruxelles, EVO, 1979, p.34
[12] Deneckere,
Gita Les turbulences de la Belle époque 1878-1905 in Nouvelle
histoire de Belgique. Vol.1 : 1830-1905, coll. Questions à l’histoire,
Bruxelles, Complexe, 2005, p.129
[13] In
sous la direction d’Alain Rey, Dictionnaire
historique de la langue française, Paris, Le Robert, 2006, p.593
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