samedi 20 décembre 2008

journée nationale de mobilisation interprofessionnelle le 29 janvier 2009

Ci-dessous, un communiqué français dont les syndicats belges pourraient (devraient ?) s'inspirer. A l'heure où les composantes du mouvement ouvrier en Belgique semblent enfin se décider à reparler d'idéologie et à dire que c'est bien le système capitaliste qui doit aujourd'hui être aboli, organiser une action le même jour qu'en France (et, rêvons un peu, ailleurs en Europe) pourrait avoir un certain effet. Cela me semble d'autant moins impossible que les revendications contenues dans cet appel peuvent facilement être reprises par les syndicats belges. L'on renouerait ainsi avec une tradition internationaliste d'autant plus nécessaire au vu de la manière dont fonctionne l'Europe aujourd'hui.

APPEL DES ORGANISATIONS SYNDICALES
CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, SOLIDAIRES, UNSA.

La crise économique amplifiée par la crise financière internationale touche durement une grande partie des salariés dans leurs emplois et leurs revenus. Alors qu’ils n’en sont en rien responsables les salariés, demandeurs d’emploi et retraités, en sont les premières victimes. Elle menace l’avenir des jeunes, met à mal la cohésion sociale et les solidarités ; elle accroît les inégalités et les risques de précarité.
Surmonter cette crise implique des mesures urgentes d’une autre nature que celles prises par l’Etat et les entreprises, pour être au service de l’emploi et des rémunérations.

C’est pourquoi, les organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, SOLIDAIRES, UNSA) appellent les salariés du privé et du public, les chômeurs et les retraités, à une journée nationale de mobilisation interprofessionnelle le 29 janvier 2009 : elle donnera lieu dans tout le pays à des grèves et des manifestations.
Elles appellent à agir massivement et interpeller les responsables gouvernementaux, les responsables patronaux et les employeurs pour :

- défendre l’emploi privé et public,

- lutter contre la précarité et les déréglementations économiques et sociales,

- exiger des politiques de rémunérations qui assurent le maintien du pouvoir d’achat des salariés, des chômeurs et des retraités et réduisent les inégalités,

- défendre le cadre collectif et solidaire de la protection sociale,

- des services publics de qualité qui assurent en particulier tout leur rôle de réponse aux besoins sociaux et de solidarité.

Les organisations syndicales rendront publique le 5 janvier 2009, une déclaration commune développant leurs propositions et revendications.

mercredi 10 décembre 2008

La crise et la "gauche"

C'est à nouveau La Libre Belgique (bien que cette fois-ci Le Soir se soit manifesté positivement mais trop tard) qui dans son édition de ce mercredi 10 décembre 2008 en p.27 publie une nouvelle carte blanche du Ressort que je cosigne avec Yannick Bovy, Pierre Eyben, Raoul Hedebouw, Eric Jadot, Laurent Petit, Michel Recloux, Olivier Starquit, Karin Walravens. Une autre carte blanche, à découvrir ici, a rebondi sur notre texte.

Depuis plusieurs mois maintenant, la crise financière fait la une des journaux et suscite l’inquiétude de la population, et ce d’autant plus que s’aggravent ses répercussions sur ce que d’aucuns appellent l’économie réelle (1).

Paradoxalement, c’est la droite libérale qui, avec plus ou moins de cynisme et d’opportunisme, a réagi le plus rapidement dès le début de la crise bancaire en Belgique, prônant "davantage de régulation" et une intervention massive et immédiate de l’Etat. Qui aurait pu imaginer sans ricaner, avant le début de cette crise, entendre un jour ces idéologues carnassiers, croisés du libéralisme triomphant, membres éminents du VLD ou de l’"Itinera Institute", appeler à la nationalisationdes banques ?

Bien sûr, il ne s’agissait pour eux que de socialiser les pertes au plus vite, en attendant le jour béni d’une juteuse revente au privé. Mais par l’absurde, ils révélaient le silence assourdissant et pathétique dans lequel la gauche restait murée.

La gauche anticapitaliste et les altermondialistes ne parviennent toujours pas à susciter une adhésion populaire suffisante pour permettre une certaine visibilité de leurs messages de rupture nécessaire avec le capitalisme et de leurs propositions alternatives alors que pourtant une part de plus en plus importante de la population va durement subir (ou subit déjà) les conséquences de la crise financière (perte d’emploi, chômage économique, modération salariale, diminution du pouvoir d’achat,)

Le silence timoré de la gauche social-démocrate (qu’elle soit politique, mutuelliste, associative ou syndicale) n’en apparaît donc que plus évident. Bien qu’établie, institutionnelle, au pouvoir, médiatiquement et politiquement audible, elle est restée muette, comme abasourdie, amorphe, ignorant le boulevard politique qui s’offrait à elle. Quelle plus belle occasion, pourtant, que cette crise illustrant la faillite libérale, pour retrouver vigueur et combativité, et renouer avec un vrai projet de gauche, fondé sur l’égalité, la solidarité, la justice sociale? Quelle plus belle occasion de (re)mettre à l’ordre du jour la rupture avec un système qui nous mène à la catastrophe sociale, économique, environnementale?

Hélas, rien de rien, morne plaine. Foin de rupture:après qu'on eût renfloué les banques, il ne fut guère question que de "plus grande régulation du système", de fades mesures correctrices et de nécessité de se serrer les coudes, "au-delà des divergences partisanes", pour surmonter la funeste crise et "sauver le système". Même le grotesque ne nous fut pas épargné, avec l’appel du PS à un "Kyoto de la finance". L’union sacrée pour sauver le capitalisme, comme il faut sauver notre milieu naturel: lumineux parallèle et courageuse ambition pour des héritiers de l’idéal socialiste

Pourtant, on l’a dit, cette crise est plus que jamais l’occasion pour elle, et pour toute la gauche, de reprendre la main. Au-delà de l’émergence de débats critiques sur la fallacieuse "autorégulation des marchés", sur les bienfaits du libéralisme à tout crin, sur le sens de créer de la richesse (comment? pour quoi? pour qui?), ces dernières semaines ont contredit le discours tenu depuis des années selon lequel c’est l’Europe, la "mondialisation heureuse" qui décide, et que seul, un Etat ne peut rien faire.

La rapidité sidérante de certaines décisions gouvernementales récentes (2) montre que lorsque la volonté politique y est, les leviers de l’Etat sont tout sauf inefficaces et inutiles. Il est piquant de constater à cet égard que le principe d’une "concurrence libre et non-faussée" porté aux nues par le projet de Traité constitutionnel européen comme dans son clone, le Traité de Lisbonne, aura été sérieusement malmené Plus de 20 milliards d’euros pour sauver le secteur bancaire, rien qu'en Belgique, c’est une sacrée entorse au catéchisme de la concurrence, pourtant avalisée sans broncher par la Commission européenne

Contredisant la doxa libérale, la puissance publique, l’Etat, semble reprendre sa configuration d'antan. La question est: pour faire quoi? A tous les progressistes, à la gauche, de se saisir de cette question et de revenir au centre du débat politique. Citons ici, en vrac, quelques pistes d’action ni spécialement originales, ni outrageusement révolutionnaires, mais susceptibles de contribuer à une véritable transformation de la société, avec l’intérêt général comme lanterne:

- Création d'une banque publique centrée sur son métier de base. L'exemple de la Kiwibank Néo-Zélandaise créée en 2002, qui connaît un succès populaire impressionnant et reste totalement épargnée par la crise actuelle car n'ayant pas misé sur le marché spéculatif mondial, démontre que c'est possible - et grandement nécessaire.

- Fin des mesures, notamment fiscales, de promotion des pensions par capitalisation, qui alimentent les fonds de pension jouant un rôle central dans la spéculation responsable de la crise. Et renforcement des pensions par répartition.

- Fin des mesures de "consolidation stratégique" ou "d'adaptation à la concurrence" qui ne sont dans les faits que des privatisations et donc des destructions du service public. La crise est l'occasion de tirer le frein à main et de procéder à des reprises de contrôle public (3). Les exemples du secteur de l'énergie, qui voit les prix exploser, ou de la poste, nous semblent ici particulièrement emblématiques.

- Remise en cause de la croissance du PIB comme objectif économique et politique. Intervention de l’Etat pour une affectation prioritaire des facteurs de production vers la satisfaction des besoins fondamentaux de la population, les investissements durables apportant une plus value sociale et environnementale (isolation des logements, énergies renouvelables, transports en commun, infrastructures adaptées pour les personnes handicapées, crèches, aide aux personnes âgées,).

- Augmenter la fiscalité sur les revenus du capital (qui est injustement basse par rapport à la fiscalité sur les revenus du travail), ce qui permettrait une diminution de la fiscalité indirecte.

- Sur le plan international, outre l'abolition inconditionnelle de la dette du Tiers-Monde, la suppression des paradis fiscaux et la création d’une taxe de type Tobin-Spahn sur les transactions financières, il s'agit de réformer en profondeur, voire de supprimer (pour les remplacer par d'autres, démocratiques et axés sur la solidarité internationale et la coopération plutôt que sur la perpétuation de règles économiques iniques) les institutions internationales comme le FMI, la Banque mondiale ou l'OMC, et de renforcer, a contrario, des organismes comme l'OIT, en le dotant notamment d’un pouvoir de coercition.

Toutes ces propositions ne sont certes pas faciles à mettre en œuvre. Mais elles n’en sont pas pour autant irréalisables, loin s’en faut. S’il n’en fallait qu’une preuve: depuis quelques années déjà, certains pays d’Amérique du Sud bouillonnent à des degrés divers. D’innombrables utopies sont devenues réalités concrètes pour des populations entières. Reprise de contrôle par les peuples de leurs ressources naturelles, nationalisations, programmes ambitieux concernant la santé, l’éducation, l’environnement, création d’une Banque du Sud, etc.

Ces propositions nécessiteront des mesures à court terme fondées sur une volonté d’agir dans le long terme, pour transformer radicalement et durablement un système économique qui a suffisamment démontré son incapacité à produire du bien être pour tous. Elles requièrent également d’établir une dialectique entre un changement de la société par la consommation et par la production, afin de ne pas reproduire les impasses productivistes.

Elles nécessitent en outre un travail fondamental d’éducation populaire évitant les discours moralisateurs tout autant que les discours poujadistes. Un travail qui permette à chacun de se forger les outils pour interroger le monde et le transformer. Il faut changer d’urgence l’eau du bain culturel dans lequel nous baignons depuis si longtemps qu’on en a oublié que d’autres façons de nager ensemble sont possibles.

Elles réclament enfin, de la part des responsables et des acteurs politiques qui se disent de gauche, le courage et la volonté non seulement de changer leur discours mais également de passer de la parole aux actes.

(1) Le problème est que l’économie spéculative est aujourd’hui si intimement liée à l’économie réelle qu’il est devenu quasiment impossible de les dissocier

(2) 48h pour sauver Fortis des années pour ne pas sauver les précaires, les chômeurs, les salaires, les pensions, les sans-logis, les sans-papiers

(3) Voir l'exemple de la Norvège: www.france-alter.info/sarkofree.htm

samedi 6 décembre 2008

La fabrique du terrorisme

Ce vendredi 05 décembre 2008, Le Soir a publié cette carte blanche dont je fais partie des signataires

Le 11 novembre dernier en France, une vaste opération de police conduisait à l’inculpation de neuf personnes suspectées de terrorisme. L’opération ciblait une « nébuleuse anarcho-autonome » qui serait à l’origine de sabotages de caténaires provoquant des retards sur le réseau TGV. Les inculpés encourent jusqu’à vingt années de prison.

La destruction de caténaires est un délit de droit commun. Il est admis par ailleurs que les sabotages en question ne pouvaient causer le moindre dommage physique. En conséquence, leurs auteurs s’exposeraient, au pire, à une inculpation pour « dégradation en réunion ». Mais, depuis quelque temps déjà, les Etats européens se dotent de législations anti-terroristes qui leur permettent de requalifier ce type de faits. Les présumés saboteurs sont ainsi poursuivis pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ».

« Association de malfaiteurs », voilà ce qui nous a été donné à voir et à entendre, à savoir, la construction pièce par pièce d’une organisation criminelle, avec son « cerveau » guidant « ses troupes » au combat, avec des liens et des opérations à l’étranger, sa méfiance envers les téléphones portables et sa participation à la vie d’un village masquant des activités inavouables. La constitution d’un tel environnement a permis de hausser la mise hors service de caténaires au sommet de l’échelle de la criminalité, puisqu’elle serait « en relation avec une entreprise terroriste ».

Qu’entend-on par terrorisme ? L’usage de ce mot est fluctuant. Il peut prêter à des assignations aussi variables que le statut officiel réservé aux maquisards avant et après la Libération. Dans son sens le plus général, il désigne des actions visant à provoquer la terreur dans la population. Peut-on y assimiler des dégradations de matériel de la SNCF causant des retards de trains ? Selon le gouvernement français, oui. Et c’est cette assimilation qui justifie d’appliquer aux présumés saboteurs un régime judiciaire plus sévère que celui qu’on réserverait à des braqueurs de fourgons.

Dès l’instant où la qualification de terrorisme est énoncée, les inculpés sont soumis à une législation qui déroge de fait au droit pénal ordinaire et aux principes à la base d’un Etat de droit. Ce type de législation crée une discontinuité dans le traitement judiciaire de faits rigoureusement identiques. Cette justice d’exception se traduit concrètement, en France, par la création d’un parquet et d’une brigade anti-terroristes, par des peines doublées, par une garde à vue pouvant durer jusqu’à six jours, ou encore par l’instauration d’une Cour spéciale d’assises sans jury populaire. En Belgique, ces glissements au sein du droit pénal existent également, et sont loin de se limiter à l’utilisation des fameuses « méthodes particulières d’enquête ». Pour avoir traduit un communiqué d’une organisation clandestine turque, Bahar Kimyongür a été condamné à 5 années de prison, tandis que Bertrand Sassoye subissait cet été presque deux mois de détention pour ses liens supposés avec le « Parti communiste politico-militaire » d’Italie.

La seconde mutation qu’introduit ce droit tient au fait qu’on n’y réprime plus seulement des actes mais aussi les simples intentions prêtées à des personnes, en vertu des menaces potentielles qu’elles représenteraient pour la sécurité publique. Le groupe ciblé est ainsi présenté comme « potentiellement dangereux », le procureur allant jusqu’à leur prêter l’intention de projeter « des actions plus violentes contre des personnes » ; toutefois, nuance-t-il, « cet élément n’est pas encore solidifié »…

Un autre trait constitutif de l’action terroriste tient à ce que celle-ci vise à déstabiliser l’Etat. Le terrorisme est un acte criminel dont la particularité tient à sa finalité politique. La ministre de l’Intérieur a ainsi expliqué que les saboteurs « ont voulu s’attaquer à la SNCF, car c’est un symbole de l’Etat ». Pour pouvoir parler de terrorisme, il faut montrer qu’il y a menace d’attentats ou volonté de s’en prendre à l’Etat. Ce qu’ont fait respectivement le procureur et la ministre.

L’intention terroriste fait le terroriste. Mais comment évaluer la nature d’une intention, à plus forte raison en l’absence de toute revendication comme c’est le cas ici ? Par exemple, en prêtant au groupe des « discours très radicaux » et en exhibant des extraits d’un livre, L’insurrection qui vient. Mieux, on ressort leur participation à différentes luttes politiques, qu’on présente comme une machination s’autorisant n’importe quelle forme de violence, ne respectant rien ni personne.

Assurément, ce n’est pas la gravité des actes qui est visée ici. Ce qui justifie l’interprétation catégorique et la répression anormalement sévère des actes incriminés, ce sont des idées, des idées jugées inadmissibles, et tenues pour criminogènes. C’est aussi une appartenance politique et le recours à des moyens illégaux, dont la légitimité va pourtant de soi dans la plupart des conflits sociaux.

Ces législations d’exception, approuvées avec une étrange insouciance par nos parlementaires, s’appuient toutes sur un terme, « terrorisme », dont l’utilisation passe inévitablement par une appréciation subjective qui prête à l’amalgame et à l’arbitraire. Tolérer l’existence de ces législations anti-terroristes constitue une menace perpétuelle pour toutes les formes de pensée ou d’action politiques et sociales considérées comme non-conformes. Les inculpés de Tarnac aujourd’hui, et demain, à qui le tour ?

jeudi 4 décembre 2008

Délégation syndicale

Ce jeudi 6 novembre avaient lieues les élections destinées à renouveler la délégation syndicale au sein du CAL. Dans le prolongement de mon élection comme délégué effectif au Conseil d'Entreprise, j'étais à nouveau candidat. Et le résultat des votes m'a très agréablement surpris puisque sur 40 votants j'ai fait le meilleur score avec 31 voix.
Cette élection constitue donc une nouvelle étape, avec mon élection le 2 décembre comme suppléant au comité exécutif du Setca de Liège, dans mon implication syndicale.